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La frégate furtive de premier rang de la Marine nationale quitte Brest pour un destin nordique, quelque part où les grandes nations maritimes se rencontrent et se jaugent. J’ai prévu de saisir quelques clichés à cette occasion. VHF en route, je signale ma présence comme convenu lors du briefing.
Des bateaux de guerre, le château du bas de la ville en a vu passer des milliers depuis l’époque de la Marine du Roi. Le temps de franchir la passe de la digue sud, et la FREMM recrache, dans un flot de vapeur, le pilote maritime sur bâbord. Cette vapeur, très esthétique pour la photographie, est en réalité un outil qui accroît la furtivité de l’unité.
À bord de la pilotine, une haute autorité est venue saluer l’équipage en passerelle avant cette mission importante pour notre pays. Le très haut gradé quitte le bord avant que le bateau gris ne franchisse le goulet de la rade de Brest. Le phare du Minou et la silhouette de son sémaphore désaffecté sont déjà bien en vue.
Le goulet est franchi et la fière unité prend de la vitesse. Son étrave frappera bientôt la petite houle venue du large, agitée par le vent de noroît. Je prends quelques clichés lointains, puis il est temps de mettre les gaz sur *Sweetie VII*, mon fidèle petit semi-rigide. J’ai en tête une photographie bien en face du navire, car la houle est présente, et cela pourrait bien me servir de décor mystérieux !
Je sous-estime le mauvais état de la mer en Iroise. Le titan des mers commence déjà à tanguer tranquillement, et moi, je m’accroche pour le dépasser et me mettre à bonne distance sur sa route. Quelques sauts et collisions liquides plus tard, je suis enfin en bonne position. Un coup d’œil sur mon téléphone portable : un SMS du commandant s’affiche — « On va récupérer notre hélico ! »
La tension monte à bord de ma petite embarcation. Je suis seul, mais diablement excité ! Je pense tout de suite au cliché que j’avais fait quelques années auparavant sur la FREMM *Normandie*, qui avait également récupéré son aéronef ; j’avais saisi la scène à la perpendiculaire, et le cliché se trouve actuellement en très belle place au musée de la Marine, à Paris !
J’ai donc l’opportunité de refaire cette scène, mais cette fois, en face du bateau. L’objectif de 600 mm braqué sur l’étrave, j’attends ma proie. Cette dernière est plutôt gigantesque ; il faut que la scène arrive vite, sinon je serai obligé de me replacer sans avoir pris un seul cliché ! Coup de chance : les marins du ciel, maîtrisant à la perfection la manœuvre d’appontage, s’exécutent en très peu de temps. Le cliché est dans la boîte.
Je laisse passer la frégate, en prenant cette fois-ci le 300 mm : une bien jolie scène s’offre à moi avec le ballet des marins du pont. Gourmand, je tente de nouveau une passe photographique en laissant le géant me venir dessus et tenter un cliché au 28mm. Quand la frégate arrive à moins de 100 mètres, je ne suis plus sûr de moi du tout et j’abandonne l’idée. Piloter mon embarcation seul et shooter au grand angle en même temps n’est pas un sport de masse et les conditions ne sont pas si clémentes…
J’aperçois le commandant me faire un salut depuis l’un des sabords. C’est un grand commandant ; sa silhouette est reconnaissable entre mille officiers ! Je suis fier de lui répondre, il est de ceux que j’aime fréquenter pour son flegme, sa culture et son amour de la mer et des bateaux…
Le soleil continue de descendre vers l’horizon et donne du relief aux nuages et à la surface de l’eau. À ce moment précis, je sais que je vais pouvoir tenter un joli paysage maritime avec la belle d’acier comme timbre-poste…

Bon vent et belle mer à nos valeureux marins !