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L’Abeille Bourbon n’est plus…

Vive l’Abeille Bretagne !

Il y a dix ans, une intuition artistique et un petit accident photographique m’ont montré le chemin d’une série de captures située entre le ciel et sous la mer, le dioptre de la surface liquide séparant les deux milieux que tout oppose en matière de lumière. 

L’univers sous-marin est mystérieux. Il absorbe très vite la lumière, et par un jeu de dupes pigmentaires, fait disparaître progressivement les couleurs à mesure que l’on s’enfonce dans sa masse. C’est l’univers du secret, le monde du mystère. On en sait moins sur le fond des océans que sur l’espace lointain ! Côté ciel, en Bretagne, nous avons la chance d’avoir parmi les plus belles compositions au monde. Une saine concurrence avec l’Écosse cependant…

Il y a dix ans donc, je découvrais derrière l’écran de mon boîtier emmitouflé dans son caisson étanche, une scène bien singulière. Je tournais avec mon petit semi-rigide autour d’un remorqueur de haute-mer dénommé Abeille Bourbon. J’avais envie de voir quelque chose d’impossible, une scène fantasmée, un point de vue singulier sur un navire de légendes. Les deux lumières artificielles immergées, des flashs, permettant de compenser la lumière diffuse du ciel et la scène se révèle alors comme par magie. C’est ce petit côté excitant de la photographie qui rend accroc. Un pourcent d’idées fertiles qui compensent 99% d’idées stériles. La chance sourit aux audacieux comme disait l’autre…

Évidemment, quand une recette fonctionne, on a tendance à la répéter. Phare de la Jument, SNLE Le Vigilant, Frégates Étoile et Hermione… Jusqu’à réitérer sur les deux Abeilles réunies plus récemment à Brest, la Flandre et la Bourbon à l’occasion d’un dernier hommage. 

L’Abeille Flandre n’est plus. Elle laisse un héritage si prestigieux, si authentique. Une vie de services rendus, de scènes formidables, d’histoires contées mille fois. Les noms de Bulot et Claden, d’anciens commandants, à jamais gravés sous forme de légendes patrimoniales. L’Histoire maritime avec un abyssal « H »…

L’Abeille Bourbon n’est plus. A mi-vie, est-ce une forme de ré-incarnation qui s’opère ? Le fier vaisseau a vingt ans. Il a également permis d’éviter une vingtaine de catastrophes écologiques du calibre de l’affreux naufrage de l’Amoco Cadiz en 1978 à quelques brasses du magnifique Eden Portsallais. Côte nord du Finistère, le plus beau trait de côte granitique au monde. Une saine concurrence avec la Corse évidemment…

Dans vingt ans, elle rejoindra la Flandre au paradis des bateaux, ou plutôt à l’Élysée des ferrailleurs !

En attendant, l’Abeille Bourbon n’est plus,

Vive l’Abeille Bretagne !